
Premiers tours de roue sur le territoire danois, vers la supérette…

La mer Baltique était calme et le temps doux, j’étais impatient d’arrivée au Danemark, d’autant que mon père m’avait prévenu, au Danemark la bière est dans leur culture, je n’aurais pas de problème pour en trouver. Une fois sorti du ferry j’ai donc foncé au premier magasin ouvert proche du port de Frederikshavn et j’y ai trouvé mon bonheur.

Les shelters
Une fois ravitaillé, je me suis orienté vers le shelter au Nord la ville devant le port de plaisance. Les shelters sont une spécialité danoises, ce sont des abris pour accueillir les voyageurs. Certains sont sommaires avec juste un abri bas fermé sur trois côtés avec un plancher pour dormir et où ne tient pas debout. D’autres sont plus élaborés avec plusieurs chambres. Il peut y avoir de l’eau et des toilettes à proximité et souvent une place à feu avec une hache pour couper du bois et refaire le plein pour les voyageurs suivants. Une appli les référence tous, ils sont gratuits et il y en a vraiment partout. De plus les campings sont nombreux et pas chers avec des bonnes surprises, cela change des campings hors de prix en Suède.

Le shelter est grand avec deux chambres, de quoi dormir en dessous et une terrasse avec une vue sur la marina. Il y a déjà des occupants, des danois en voyage ou en mode de vie voyage, je n’ai pas tout saisi, mais je m’installe sur la terrasse en m’abritant, des orages sont prévus dans la nuit. La soirée est sympathique, les danois toujours sympa et accueillants.

Rouler sur la plage

Le lendemain, je vais découvrir les paysages danois, par rapport au autres pays de l’EDT, je ne m’étais pas du tout préparé au Danemark, ma carte s’arrêtait à Göteborg, là je découvre en avançant.
Les paysages sont assez plats mais il y a un bon réseau de chemins, les deux premiers jours je parcourais la lande et les dunes de la côte Ouest côté Mer du Nord. Les paysages sont vraiment grandioses, les dunes sont perchées sur des falaises ce qui leur donnent de l’envergure avec des accès à la plage avec de quelques centaines de marches. L’arrière pays et un patchwork de campagne et de forêts avec des passages sableux mais souvent roulants. C’est moins rectiligne que précédemment, souvent ludique et je me perds une fois dans le réseau de chemins. les stations balnéaires s’enchaînent et je croise un nombre conséquent de petites maisons en bois noir avec des fenêtres blanches réparties régulièrement le long de la côte, quand elles sont occupées, elles arborent un drapeau danois.

Durant la première journée, après avoir traversé un champ de dunes assez péniblement, je croise un groupe d’autochtones dont un plus âgé qui m’alpague carrément. Il me dit que je n’ai pas le droit d’être sur ce chemin à vélo et me le fait confirmer par un garde nature présent dans le groupe, ce dernier est plus mesuré et me le confirme gentiment en me disant de m’écarter des dunes pour la suite. Je leur explique que je suis un itinéraire européen et que je n’ai vu aucun panneau interdisant le vélo sinon je ne serais pas passé par là, le plus âgé me coupe en commençant à me raconter sa vie, je le recoupe en lui disant gentiment que je l’écouterais quand il m’écoutera. La discussion s’arrêtera là. Bon, OK.
Rouler sur la plage

Pour le reste, je profite bien de ses rivages marins, le GPS m’envoie sur une longue portion de plage, pour ne pas avoir la même expérience que le matin je contrôle sur la carte, et il y a bien une route indiquée directement sur la plage. C’est étonnant mais en arrivant sur place, la route débouche bien sur la plage qui devient la route. C’est accessible pour tous les véhicules sur des dizaines de kilomètres. Les voitures sont stationnées directement sur la plage où elles le souhaitent et chacun peut s’isoler pour profiter de la mer. C’est déroutant au départ mais on s’y fait, le sable est damé et ça roule pas trop mal.
LE Phare

En suivant une route sur l’arrière-pays, j’aperçois une dune gigantesque avec un phare posé dans une courbure en son centre, je n’y passe pas mai je fais le détour. J’avance quelques centaines de mètres sur le chemins. C’est très touristique et de plus en plus sableux, je pose le vélo sans l’attacher et je continue à pied. L’endroit est magique, c’est le phare de Rubjerg Knude, un des endroits les plus emblématiques du pays. Avec le recul de la falaise, le phare était devenu trop proche de la falaise et étant donné son importance, il a été reculé de 70 m en 2019. La vue du haut sur la côte et les falaises est unique. Toute la côte montre un aspect très préservé et elle est très agréable à parcourir et à découvrir.

En suivant la mer, des paquets de nuages se forment, les averses se préparent, ça fait deux semaines que je n’ai pas eu de pluie, je ne vais pas me plaindre. Je vise un camping pour le soir d’autant que durant la journée la chaleur devient lourde et je me sens poisseux. Une espèce de sensation d’être gras, mes mains, ma peau, mes habits, tout me semble désagréable. Il est vrai que ça fait 4 jours que je n’ai pas pris de douche et je n’ai pas lavé mes habits depuis le départ. Je vise donc un camping pour le soir avec tout le confort. Sur mon trajet, le ciel se déchirera et des trombes d’eau viendront ajouter de la moiteur à mon inconfort.

Camping de confiance
Il y a le choix dans les campings. Les tarifs me semblent bas, j’étais habitué à payer entre 20 et 30 € en Suède, là c’est plus 10-15 €, cela m’étonne au départ, mais c’est normal et c’est d’autant mieux. J’arrive au camping, l’accueil est ouvert mais il n’y a personne, il est indiqué d’appeler un numéro. J’appelle pour prendre un emplacement en tente et une lessive, la personne me donne un code en me disant que c’est mon code perso, je pourrais tout faire avec et je paierai tout le lendemain. Donc sans laisser de pièce d’identité, ni empreinte bancaire, j’ai un code qui me permet, d’accéder au camping, de faire mes lessives, d’aller à la supérette, de prendre ce que je ceux en bipant moi-même et je paierai tout le lendemain… Je trouve ça hallucinant, c’est vraiment une autre culture qui repose énormément sur la confiance. Je m’installe donc, lessive, douche, je mets ce qu’il me reste de propre et sec sur moi, un pantalon de pluie et un gilet, des chaussettes étanches et des sandales, pour le style on repassera. Le camping est vraiment bien équipé, il y a une cuisine commune avec du gaz, une salle pour se poser avec un billard.
L’âge des vikings marque le territoire.

Après cette bonne soirée, je repartirais rechargé et propre. Je suivrai la côte un moment avant de bifurquer vers le centre du Jutland, la partie continentale du Danemark. Les champs et les prairies succèderont aux dunes et à la lande. Les forêts, les lacs et petites villes ponctueront le parcours. L’empreinte viking est vraiment très présente avec les tumuli en bordure de forêt, les pierres runiques, les navires de pierre à chaque coin de rue. Tout est bien balisé et indiqué pour ne rien louper du patrimoine. Le site de Jelling est un incontournable du genre avec les tumuli royaux. Les sites sont souvent bordés d’églises marquant la christianisation du Danemark après l’époque viking.

L’itinéraire empruntera une grande partie de petites routes, de pistes roulantes et quelques singles, les nuits se feront dans les shelters. Je serais même réveillé un matin par une classe verte de maternelle. Blotti dans le duvet, j’entendrai du bruit le matin, les professeurs me diront que l’un d’entre eux fête son anniversaire. Nu dans le duvet, je m’habillerais tant bien que mal pour ne pas gâcher la fête.

J’avancerais comme ça de shelter en shelter pendant 3 jours jusqu’à la frontière allemande. Je croiserai même un pigiste devant une supérette qui fera un article sur mon périple dans le journal local. Le Comte de Monte Christo m’accompagnera tout le long en fomentant longuement sa revanche, je terminerai le livre juste en sortant du pays.
